Lors d'une session organisée conjointement par l’ATIBT et Rainforest Alliance, des gestionnaires forestiers, des chercheurs et des experts de l'environnement, issus notamment des pays du Sud, se sont réunis pour réfléchir aux enseignements tirés des régions forestières tropicales et explorer comment FSC peut rester pertinent dans un contexte écologique, social et commercial en pleine évolution.
Au cours des 30 dernières années, la certification FSC a favorisé la promotion de la gestion durable des forêts dans les forêts tropicales naturelles d'Afrique, d'Amérique latine et d'Asie du Sud-Est. Mais la gestion durable des forêts reste largement méconnue, mal représentée, ou confondue avec la déforestation. La certification des forêts tropicales a également été confrontée à des défis techniques, économiques et de réputation.
30 ans de gestion durable des forêts tropicales
Caroline Duhesme, Directrice de la stratégie et de l'innovation à l'ATIBT, a ouvert la session en relatant des expériences vécues au cours de 30 années de gestion durable des forêts dans le bassin du Congo. Elle a expliqué que la certification était vitale pour veiller à ce que les normes sociales et environnementales soient respectées dans les régions où la gouvernance peut être faible. Il reste cependant des défis à relever.
« Dans le bassin du Congo, la certification coûte cher car nous sommes dans des pays où les infrastructures sont insuffisantes, les gestionnaires forestiers doivent donc investir davantage pour se mettre en conformité. Paradoxalement, le marché du bois certifié ne récompense pas suffisamment ces efforts », a-t-elle ajouté.
Les forêts tropicales gérées de manière durable restent malgré tout essentielles pour le climat, la biodiversité et les moyens de subsistance locaux, nécessitant des systèmes de certification mieux adaptés aux réalités locales.
José Román Carrera, Directeur mondial des forêts pour Rainforest Alliance, est revenu sur 30 ans de concessions forestières communautaires dans la Réserve de biosphère Maya du Guatemala, et son lien avec la certification FSC. Il a montré comment le modèle de concession forestière gérée par une communauté, lancé en 1990, s'était montré efficace pour préserver la biodiversité tout en maintenant les moyens de subsistance.
« Les preuves scientifiques montrent que le volume de récolte lors du cycle d'exploitation suivant peut s'avérer aussi élevé, voire plus, que le premier »
Cependant, José Román Carrera a également souligné qu'il restait des défis à relever, en particulier concernant l'accès à des marchés stables et à des partenariats à long terme pour les produits forestiers ligneux et non ligneux.
Réflexions des participants
Lors de la table ronde qui a suivi, Joeri Zwerts, chercheur à l'Université d'Utrecht, a abordé la nécessité de continuer la recherche sur la régénération forestière et la durabilité à long terme en termes de rendement dans les forêts tropicales. Il a alerté sur le fait que l'enrichissement par plantation pouvait être coûteux et peu efficace, tout en montrant l'intérêt d'autres techniques sylvicoles, comme la coupe de lianes, pour favoriser la régénération.
Markus Pfannkuch, Co-directeur général chez Precious Woods, a réfléchi à l'impact opérationnel de la certification FSC dans la sylviculture tropicale. « Le point le plus important est la réduction de l'impact des travaux », a-t-il déclaré en expliquant que dans les concessions non certifiées, les routes sont souvent beaucoup plus larges que dans les concessions certifiées.
Il a également souligné une limite technique à laquelle sont confrontés les opérateurs forestiers, à savoir le manque d’équipements de récolte adaptés. « Nous sommes retreints dans le choix des engins » a-t-il expliqué, soulignant que des engins plus performants et plus légers réduiraient l'impact environnemental et amélioreraient l'efficacité des opérations tropicales certifiées.

Edwige Eyang, environnementaliste et chercheuse gabonaise, a réfléchi à la manière dont la certification FSC avait amélioré les pratiques sociales et environnementales dans le bassin du Congo. Elle a montré que la certification FSC avait conduit à une meilleure reconnaissance des droits communautaires et à une gestion plus inclusive des ressources forestières.
Du point de vue environnemental, elle a expliqué comment les concessions certifiées incluaient désormais les zones protégées pour des espèces essentielles telles que les grands singes et les éléphants, contribuant à la préservation de la biodiversité.
Ricardo Camargo, responsable ESG chez Imaflora, a montré que FSC avait aidé les entreprises et les communautés à s'orienter vers un mode de fonctionnement durable. « FSC a créé les conditions de la croissance pour les entreprises et les communautés, afin qu'elles commencent à produire de manière durable. Ce résultat n'a pas de prix », a-t-il déclaré. Il a toutefois averti que « nous avons besoin de davantage de marchés pour accroître la demande en bois tropical. ».
L'échange s'est conclu par un appel à une collaboration renouvelée entre FSC, les gouvernements et le secteur privé pour assurer l'avenir des forêts tropicales.
